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Michel Garroté – Bruno Jeanbart, de l’Institut de sondage Opinion Way, livre l’analyse que voici (lien en bas de page) : « Depuis une dizaine de jours, un grand classique des campagnes présidentielles a ressurgi dans l’agenda médiatique, à savoir la capacité d’un certain nombre de candidats à réunir les 500 parrainages nécessaires pour se présenter à l’élection. Et de nouveau, c’est autour de l’hypothèse d’une absence d’un candidat du Front National que s’organise le débat. Bien qu’il soit toujours présomptueux de se lancer dans un exercice de politique fiction, la question des conséquences électorales d’une éventuelle absence de Marine Le Pen dans la liste des candidats le 22 avril prochain mérite d’être posée, ne serait-ce que pour mieux comprendre qui sont les électeurs potentiels de la présidente du Front National et quelles sont leurs motivations. A priori, un retrait de Marine Le Pen de la course bénéficierait en priorité à l’UMP et à son candidat probable, Nicolas Sarkozy. La raison en est simple : lorsque l’on demande aux électeurs du Front national de se situer sur un axe politique gauche/droite, les deux tiers d’entre eux (64%) se positionnent à droite de l’échiquier politique (15% à droite, 49% très à droite). Seuls 2% se positionnent au centre et 3% à gauche. Il n’est guère surprenant de constater que Nicolas Sarkozy est le candidat qui attire le plus les électeurs de Martine Le Pen, dans l’hypothèse où celle-ci ne serait pas candidate ».
« En moyenne, un quart des électeurs Le Pen déclarent qu’ils voteraient pour le président de la République si celle-ci n’était pas candidate. François Bayrou apparaît comme étant l’autre prétendant qui pourrait "héberger" un nombre conséquent de ces électeurs orphelins : environ 15% en moyenne des électeurs de la présidente du FN affirment qu’en son absence, ils voteraient Bayrou. Là encore, c’est cohérent avec le positionnement politique de ces électeurs : 31% d’entre eux déclarent n’être ni de gauche, ni de droite, lorsqu’on les invite à se classer sur une échelle politique. A l’inverse, François Hollande ne semble pouvoir espérer récupérer que très peu de ces électeurs au premier tour, 5% environ, soit un niveau comparable à celui que pourrait rallier Jean-Luc Mélenchon… ou Nicolas Dupont-Aignan. Le résultat d’une élection se calculant en suffrages exprimés, l’impossibilité de se présenter pour la présidente du FN modifierait à court terme sensiblement les rapports de force de premier tour. Toutefois, cet artifice ne saurait masquer que l’absence de bulletins "Marine Le Pen", le 22 avril prochain, pourrait avoir également des conséquences de plus long terme, en renforçant un peu plus encore la défiance politique qui s’est installée en France depuis plusieurs années. D’abord parce que 40% des électeurs de Marine Le Pen refuseraient de choisir un candidat de substitution si elle ne concourrait pas lors de ce scrutin ».
« Ce surplus d’électeurs qui s’abstiendrait pourrait faire baisser le taux de participation de 5 à 6 points, au risque de battre le triste record de 2002 (71,6% de participation seulement). Ce retrait de l’élection d’une part importante de ces électeurs serait la conséquence logique de la "défiance politique" qu’ils expriment : 80% des sympathisants du Front National ne font pas confiance à Nicolas Sarkozy, 84% à François Bayrou, 85% à François Hollande et 93% à Jean-Luc Mélenchon. Dans le même temps, 80% pensent que la démocratie fonctionne mal en France (contre seulement 19% qui estiment qu’elle fonctionne bien), et n’ont confiance ni dans la droite ni dans la gauche pour gouverner le pays. Enfin, 82% déclarent que les notions de droite et de gauche ne veulent plus dire grand-chose. Au-delà de l’électorat de Marine Le Pen, dont une partie pourrait se couper un peu plus encore de la participation politique dans cette hypothèse, le risque d’aggravation de la défiance politique auprès de l’ensemble de la population est non négligeable. Les Français se déclarent aujourd’hui très largement favorables à ce que la présidente du Front National puisse se présenter à l’élection présidentielle. Si tel n’était pas le cas, nul doute qu’elle se saisirait de la situation pour accuser le système de tenter d’éliminer ce courant politique. A l’heure où 60% des Français jugent que la démocratie fonctionne mal en France, cette dénonciation trouverait probablement un écho dans la société française », conclut Bruno Jeanbart.
Michel Garroté
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