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Michel Garroté – Le néo-conservatisme économique, le libéralisme économique et l’économie libre de marché sont des concepts totalement absents des élections françaises, présidentielles et législatives. Pire, ces concepts sont assimilés à une monstruosité économique dont il est tout simplement interdit de débattre. La liberté de débat et d’expression « à la française » se surpasse. Le plus hallucinant, c’est que, à des degrés certes divers, tous les partis politiques français sans exception, pointent hypocritement du doigt les marchés financiers, la bourse et les banques. C’est d’autant plus suspect que la France s’est abondamment servie de tout cela et que, maintenant, elle est – enfin ! – invitée à rembourser. Le FN, l’UMP, le PS, la bande à Mélenchon, les « petits » candidats, les mini-partis, tous, sans exception, tiennent un discours étatiste pour ne pas dire cryptocommuniste.
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Le comble de la présidentielle 2012 est là : au troisième millénaire, au 21e siècle, on restitue au communisme des lettres de noblesses qu’il n’a jamais eues.
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Dans ce climat liberticide et ignare, le candidat président Sarkozy n’a toujours pas le courage de proposer - de façon claire et immédiate - des actions très concrètes contre le déficit et contre la dette. Car il ne veut pas se mettre à dos les syndicats, les médias, les sondeurs et les appareils de l’Etat. Il baratine les chefs de PME et il prend les Français pour des cons. Cette tragicomédie de boulevard atteint des sommets surréalistes, le candidat Sarkozy ayant décidé de se présenter contre le président Sarkozy. Sarko One est un gros nul qu’il faut virer, nous dit Sarko Two. Le candidat Sarko Two reproche au président Sarko One toutes ses erreurs commises durant ces cinq dernières années. En fait, dire que Sarkozy prend les Français pour des cons est un euphémisme. En réalité, Sarkozy prend les Français pour des débiles amnésiques.
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A cet égard, l’inquiétude soulevée par l’état lamentable de l’économie française fait la une de The Economist, un hebdo britannique, qui titre "La France dans le déni". L'éditorialiste estime (extraits ; lien en bas de page) qu'il y a "plus inquiétant encore que la mauvaise foi" des deux principaux candidats, à savoir : "la possibilité qu'ils pensent vraiment ce qu'ils disent". Ni les réformes économiques de François Hollande ni celles de Nicolas Sarkozy ne sont suffisamment ambitieuses : "Une France léthargique et non réformée pourrait bien se retrouver au centre de la prochaine crise de l'euro. Il n'est pas inhabituel que des responsables politiques ignorent des vérités dérangeantes pendant les campagnes électorales mais il est inhabituel, ses derniers temps en Europe, qu'ils les ignorent aussi totalement que le font les hommes politiques français. Et avec M. Hollande, qui, après tout, est encore le vainqueur le plus probable, cela pourrait avoir des conséquences dramatiques".
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The Economist vise aussi Sarkozy : "Même si c'est Nicolas Sarkozy qui est réélu, les risques ne disparaîtront pas. Il n'ira pas jusqu'à proposer quelque chose d'aussi stupide que de taxer à 75% mais il n'envisage ni les réformes radicales ni la réduction structurelle des dépenses publiques dont la France aurait besoin". Conclusion : "La France insouciante est sur le point d'être rattrapée par la dure réalité, quel que soit le président".
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De son côté, Contrepoints a publié un entretien avec le député Christian Vanneste (extraits ; lien en bas de page) : "Le terme conservatisme est systématiquement dénigré par les responsables. Écoutez le président de la République par exemple. Chaque fois qu’il emploie le mot conservateur c’est manifestement pour stigmatiser une attitude. Dans les pays anglo-saxons, les partis de droite s’assument comme conservateurs, ce qui correspond à ma position dans tous les domaines, alors que la gauche y désigne des libéraux. En France, même le mot libéral est quasiment une injure, parce qu’il y a une confusion entre le libéralisme politique et le libéralisme économique, bien-sûr toujours suspecté d’hyper-libéralisme, une espèce de capitalisme sauvage. Ce qui est consternant dans la mesure où parmi les plus grands penseurs libéraux, il y a un certain nombre d’auteurs français importants, ne serait-ce que Montesquieu, Benjamin Constant qui est complètement ignoré, Bastiat et l’immense Tocqueville, un des penseurs les plus lucides sur l’évolution de la démocratie. Leur occultation en France est tout à fait scandaleuse. Il faut rappeler que la philosophie libérale appartient à notre histoire".
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Contrepoints - Comment expliquer cette inertie ?
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Christian Vanneste - "Cela peut se résumer ainsi : l’apparente résistance de la France à la crise repose sur une politique de consommation essentiellement fondée sur les prestations sociales et donc sur le transfert des revenus, alimenté par une dépense publique monstrueuse qui fait de la France un pays socialiste, que ce soit la droite ou la gauche qui gouverne. Quand vous avez 56% du PIB en dépense publique, vous êtes évidemment dans une structure socialiste. Cette dépense permet entre autres d’entretenir un secteur protégé confortable, avec des assistés dotés de revenus même quand le pays se porte mal, et avec de nombreux fonctionnaires qui ne ressentent pas les effets de la crise. Ce système est alimenté par le déficit, donc par la dette. Malheureusement M. Sarkozy est quelqu’un qui parle beaucoup, qui s’agite beaucoup, mais qui n’a pas eu le courage de faire les réformes à la hauteur de nos problèmes, même s’il en a réalisé davantage que ses prédécesseurs".
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Contrepoints - Situez-vous la place du libéralisme à droite ou à gauche ?
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Christian Vanneste - "Dans le paysage idéologique, il existerait un espace possible à droite, à condition d’avoir un libéralisme économique combiné avec un conservatisme social, ou bien avec un souci général des libertés individuelles primant sur l’égalitarisme. En revanche, il n’en existe pas pour le libertarisme, c’est-à-dire une pseudo émancipation des mœurs qui serait, de mon point de vue, une forme de suicide social".
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Contrepoints - Y a-t-il une droitisation de la campagne de M. Sarkozy ?
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Christian Vanneste - "Le drame du président Sarkozy est qu’il n’a pas de ligne directrice. Il n’est pas un stratège mais un tacticien de la politique. Il prend des idées dans l’air du temps, qui peuvent être de droite dans la mesure où elles lui paraissent bonnes pour communiquer, mais dont l’éventuelle mise en place est suivie de mesures contradictoires en fonction des circonstances. Ce fut le cas par exemple avec la suppression de la ‘double peine’, suivie de textes répressifs contre l’immigration. Les contre-mesures en appellent d’autres et ainsi de suite. Cette attitude empirique, dénuée de règle éthique et de cohérence, s’est particulièrement vue lors de l’ouverture à gauche, catastrophique puisqu’elle a montré que la droite a peur de défendre ses idées et s’inspire de la gauche avec vingt ans de retard. Au fond elle se cantonne dans une attitude purement pragmatique, fait diversion sur le sécuritaire et se contente de proposer un moindre mal économique, apparemment opposé à la gauche, alors que dans les pays anglo-saxons, elle a su imposer ses valeurs".
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Contrepoints - Pourquoi n’y a-t-il pas une rébellion des députés ?
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Christian Vanneste - "Parce que le système actuel privilégie les députés godillots et le clientélisme" (fin des extraits de l’entretien avec Vanneste paru dans Contrepoints).
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En somme, l’on pourrait conclure en écrivant que la France est la République du déni et du clientélisme au service des godillots. Le seul avantage d’une réélection de Sarkozy en 2012 serait qu’il ne pourrait pas se représenter en 2017. Et le seul inconvénient d’une victoire de Hollande en 2012, serait qu’elle permettrait à Sarkozy de se représenter en 2017. « Que faire ? », comme l’écrivait Lénine…
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