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Michel Garroté – C’est
politiquement très incorrect, en ces temps sécularisés, de se demander si Obama
ne serait pas – par hasard – un Messie temporel, l’AntéChrist ou un antéChrist.
C’est d’autant plus incorrect que des médias francophones se sont moqués des
Américains chrétiens parce que ceux-ci pensent qu’Obama serait peut-être un AntéChrist.
Des médias francophones qui par ailleurs se montrent extrêmement respectueux
face à l’ouverture du Ramadan, allant jusqu’à louer la spiritualité mahométane
dans ce rituel qui consiste à ne pas manger le jour et à beaucoup manger la
nuit. J’ai écrit que Obama était de « culture musulmane », en raison de son «
enfance musulmane » ; et pour affirmer cela, je me suis notamment basé sur
l’analyse de Daniel Pipes (*). Dès lors, on serait en droit de me demander en
quoi son enfance musulmane et sa culture musulmane font – éventuellement – de
Obama l’AntéChrist ou un antéChrist.
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Qu’est-ce que
l’AntéChrist ? Dans l’Épître de Jean (1 Jean 2, 18), il est écrit : « Petits
enfants, c`est la dernière heure, et comme vous avez appris qu’un antéchrist
vient, il y a maintenant plusieurs antéchrists : par là nous connaissons que
c’est la dernière heure ». A ce propos, j’aimerais rappeler que l’on peut
s’intéresser aux Ecritures tout en restant agnostique ou athée. Car hormis la
foi, c’est aussi une question de connaissance, de culture et de raison.
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Voici deux extraits
de l’Epître de Paul aux Thessaloniciens (II Thess II, 1 et II Thess II, 8) qui
nous éclairent sur l’Epître de Jean citée au paragraphe précédent : « En ce qui
concerne l'Avènement de Notre-Seigneur Jésus-Christ et notre réunion avec Lui,
nous vous prions, frères, de ne pas vous laisser ébranler facilement dans vos
sentiments, ni alarmer, soit par quelque esprit, soit par quelques paroles ou
lettres supposées venir de nous, comme si le jour du Seigneur (le jugement
dernier) était imminent. Que personne ne vous égare d'aucune manière ; car
auparavant viendra l'apostasie et se manifestera l'homme de péché, le fils de
perdition, l'adversaire qui s'élève contre tout ce qui est appelé Dieu ou
honoré d'un culte, jusqu'à s'asseoir dans le sanctuaire de Dieu et à se présenter
comme s'il était Dieu.
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Et aussi (II Thess
II, 8) : « Et alors se découvrira l'impie, que le Seigneur exterminera par le
souffle de Sa bouche, et anéantira par l'éclat de Son avènement. Dans son
apparition cet impie sera, par la puissance de Satan, accompagné de toutes
sortes de miracles, de signes et de prodiges mensongers, avec toutes les
séductions de l'iniquité, pour ceux qui se perdent, parce qu'ils n'ont pas
ouvert leur coeur à l'amour de la vérité qui les eût sauvés ».
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Je l’écris encore une
fois : l’on peut s’intéresser aux Ecritures tout en restant agnostique ou
athée. Car hormis la foi, c’est aussi une question de connaissance, de culture
et de raison. A cet égard, je note que tandis que certains se demandent si
Obama ne serait pas l’AntéChrist, d’autres se demandent si Obama ne se
prendrait pas pour le Messie. L’on prête généralement ce genre de réflexions
aux Chrétiens Evangéliques. Et l’on en profite pour présenter ces Chrétiens
Evangéliques comme des clowns hallucinés. L’on refuse, en somme, le travail des
idées sur certaines questions. Et l’on ne parle pas de clown halluciné lorsque
Mahmoud Ahmadinejad déclare qu’il va « rayer Israël de la carte » et « effacer
Israël de la page du temps ».
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Selon la culture
chrétienne, il y a déjà eu et il y aura encore plusieurs antéChrists avant
l’avènement de l’ultime AntéChrist à la Fin des Temps. Ainsi, au fil de
l’histoire, des penseurs chrétiens ont considéré que Mahomet, Robespierre, Staline
et Hitler étaient des antéChrists. Concernant l’islam, il est vrai que le Dieu
des mahométans ne correspond nullement au Dieu des Juifs et des Chrétiens. En
effet, dans la culture judéo-chrétienne, Dieu est un, unique, mais à la fois
Père créateur, Parole (Verbe) et Esprit, ce qui n’est pas le cas de la culture
mahométane qui, du reste, considère les Juifs et les Chrétiens comme des «
infidèles ». Le Dieu des Juifs et des Chrétiens est à la fois Père créateur,
Parole et Esprit. Ou plus concrètement, Il est Dieu unique en trois personnes,
en trois relations, Père, Fils et Saint-Esprit pour les Chrétiens. Et Dieu
unique en trois relations, elohim (Créateur et Père), debar elohim (Sa Parole)
et ruah elohim (Esprit de Dieu sur les prophètes) pour les Juifs.
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En réalité, les
Chrétiens Evangéliques que j’ai mentionnés deux paragraphes plus haut ne sont
pas les seuls à participer au travail des idées sur ces questions. Les
catholiques, eux aussi, y participent. Divers auteurs, Juifs et non juifs, y
compris catholiques, ont participé au travail des idées sur le Dieu
judéo-chrétien, tels Claude Tresmontant, Paul Johnson, Roy Schoeman et Eugenio
Zolli entre autres. Les médias francophones n’en font pratiquement pas état,
entre autres raisons, parce que les auteurs catholiques qui participent
aujourd’hui à ce travail des idées sont généralement italophones (Sandro
Magister) et anglophones (George Weigel).
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Ainsi, Sandro
Magister, avec un article intitulé « Il y a un étrange prophète à la Maison-Blanche
», article publié sur http://chiesa.espresso.repubblica.it/,
écrivait : « Il s'appelle Barack Obama et sa vision messianique ressemble à
celle de Joachim de Flore. On y a même cru au Vatican. Voici l'histoire d'un
faux qui a malgré tout un fond de vérité. La tempête déchaînée ces jours-ci par
les déclarations de Barack H. Obama à propos du projet du Cordoba Institute de
New York – construire une mosquée à quelques pas des Twin Towers détruites le
11 septembre 2001 par des terroristes musulmans – a ramené au premier plan une
question : quelle est la vision d’ensemble de l'actuel président des États-Unis
d’Amérique ? Dans un premier temps, le 13 août, Obama avait déclaré à la
centaine de musulmans qu’il avait invités à la Maison-Blanche pour célébrer le
début du Ramadan : "En tant que citoyen et président, je crois que les
musulmans ont le droit de pratiquer leur religion autant que n’importe qui
d’autre dans ce pays. Cela comprend le droit de construire un lieu de culte et
un centre communautaire sur un terrain privé dans la partie sud de Manhattan,
en accord avec les lois et les réglementations locales. C’est cela, l’Amérique,
et notre engagement en faveur de la liberté religieuse doit être indéfectible"
».
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« Mais le lendemain,
sous le feu des réactions, il s’est senti obligé de faire marche arrière, pas
sur le principe mais sur le cas particulier : "Je n’ai pas fait de
commentaire – et je n’en ferai pas – à propos de la sagesse de la décision de
construire une mosquée à cet endroit ; j’ai fait un commentaire très spécifique
à propos d’un droit qui remonte à la fondation de notre pays. Et je pense qu’il
est très important, même si c’est difficile, que nous ne perdions pas de vue
qui nous sommes en tant que peuple et quelles sont nos valeurs". Ceux qui
critiquent Obama ont eu beau jeu de mettre en évidence cette oscillation du
jugement qu’il a manifestée. Ce n’est d’ailleurs que la dernière d’une longue
série et elle rend incertain le jugement que l’on porte sur lui. Obama est
aussi une énigme pour l’Église catholique. Il a fait l’objet de jugements
enthousiastes et de condamnations impitoyables, dont www.chiesa a rendu compte
à l’occasion. Parmi les éloges, celui qui a été formulé par le cardinal Georges
Cottier, il y a un an, a fait beaucoup de bruit au Vatican. Parmi les
anathèmes, on peut citer ceux de Mgr Michel Schooyans et de l’archevêque Roland
Minnerath. D’après le premier, Obama est un nouveau Constantin, chef d’un
empire moderne utile pour l’Église. Pour les deux autres, c’est un faux messie
qu’il faut démasquer ».
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« Des divergences à
son sujet divisent également l'épiscopat catholique américain – dont les
leaders sont très critiques quant à certains choix d’Obama dans les domaines de
la vie et de la famille – ainsi que la secrétairerie d’état du Vatican, qui se
montre plus compréhensive, de même que "L'Osservatore Romano". Deux
livres récemment publiés en Italie étudient la personnalité d’Obama en
s’attachant particulièrement à sa vision générale du monde, ce qui est la
question la plus intéressante pour l’Église. Le premier a été écrit par un
journaliste de Radio Vatican, Alessandro Gisotti, qui a une connaissance
approfondie de l’Amérique. Le second a pour auteurs Martino Cervo, rédacteur en
chef du quotidien "Libero", et Mattia Ferraresi, correspondant à
Washington du quotidien "il Foglio". Ces deux livres montrent, à
travers une documentation riche et précise, que la vision d’Obama est en effet
pétrie de contradictions. Un exemple très clair de contradiction apparaît quand
Obama cite le théologien protestant Reinhold Niebuhr comme l’un de ses
inspirateurs. Niebuhr (1892-1971), grand admirateur et interprète de saint
Augustin, a été l’un des maîtres du "réalisme" en politique internationale.
Il affirmait en effet la primauté de l'intérêt national et de l'équilibre entre
les puissances dans une humanité profondément marquée par le mal ».
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« Niebuhr définissait
la démocratie comme "une recherche de solutions provisoires à des
problèmes insolubles". Et dans une prière célèbre il disait : "Que
Dieu me donne la sérénité d’accepter ce que je ne peux pas changer !".
Tout l'opposé, donc, de la rhétorique messianique qui imprègne les discours
d’Obama, tout l'opposé de son annonce permanente de l'avènement d’une "ère
nouvelle", d’un "nouveau début", d’un "âge de paix",
d’un monde racheté parce que "Yes, we can". Dans son livre, Gisotti
rappelle que le catholique George Weigel, célèbre biographe de Jean-Paul II, a
montré que la vision d’Obama est vraiment "l'exemple parfait de ce genre
d’utopisme contre lequel Niebuhr, avec son sens profond de la fragilité de
l’histoire et des capacités d’autodestruction des êtres humains, s’est battu
pendant trois décennies". Les discours d’Obama paraissent liés, plutôt
qu’à Niebuhr, à l'utopie d’un célèbre moine et théologien médiéval : Joachim de
Flore, qui prophétisait un "âge de l’Esprit" après ceux, révolus, du
Père et du Fils, un troisième et définitif âge de paix et de justice, où
l’humanité ne connaîtrait plus de divisions, pas même entre les religions. La
parenté d’idées entre Obama et Joachim de Flore apparaît tellement forte que,
en 2008, les médias du monde entier affirmèrent que le futur président des
États-Unis s’était référé trois fois à lui dans des discours-clés de sa
campagne électorale. Cette information parut si crédible que, le 27 mars 2009,
le franciscain Raniero Cantalamessa, prédicateur officiel de la maison
pontificale, la reprit dans l’une de ses prédications de Carême devant le pape
et la curie romaine ».
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« En réalité la
nouvelle était fausse. Obama n’a jamais cité Joachim de Flore dans aucun de ses
discours. Dans leur livre, Cervo et Ferraresi reconstruisent avec précision la
genèse et l’histoire de ce faux journalistique, auquel le prédicateur du
Vatican s’est lui aussi laissé prendre. Le père Cantalamessa fut interpellé par
l'agence en ligne de la conférence des évêques des États-Unis, "Catholic
News Service", parce qu’il avait rappelé dans son sermon que Joachim de
Flore était un hérétique. Il lui répondit : "Quelqu’un a utilisé mes
propos pour insinuer que je pense qu’Obama est un hérétique, comme Joachim,
alors que j’ai une profonde estime pour le nouveau président des
États-Unis". Donc, bien qu’Obama n’ait pas cité Joachim de Flore, il y a
bien une ressemblance entre la rhétorique du premier et la vision du second. Le
théologien et cardinal Henri de Lubac aurait sans peine ajouté Obama à la
troupe nombreuse de la "Postérité spirituelle de Joachim de Flore",
titre d’un volumineux essai qu’il consacra, il y a trente ans, à l’influence
exercée jusqu’à nos jours par l'utopie de ce moine au sein et en dehors du
catholicisme. Mais la contradiction réapparaît de nouveau lorsque l’on compare
les discours d’Obama avec ses décisions concrètes. Les troupes qui sont en
Afghanistan y restent, Guantanamo ne ferme pas ses portes, des fonds fédéraux
sont affectés à l’avortement... Jour après jour, les décisions opérationnelles
du président s’opposent à ce qui a été annoncé. Elles renvoient toujours à un "demain"
imprécis la concrétisation de l'utopie messianique que ses discours continuent
à proposer ».
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« La "nouvelle
ère" de Joachim de Flore n’a pas commencé en 1260 comme il l’avait
annoncé. Mais le rêve a survécu. Et Obama le propose de nouveau aujourd’hui
dans le cadre de ses fonctions d’homme le plus puissant du monde. Cervo et
Ferraresi écrivent : "Le fait que des propos de Joachim aient été mis dans
la bouche d’Obama est une touche d'ironie qui a tout l’air d’être un signe du
destin. L'inspiration millénariste, joachimite, totalitaire au fond, annule le
caractère inexorablement limité de la nature humaine pour confier le salut de
l'homme à l’homme lui-même ou tout au moins à celui qui se montre capable
d’incarner le désir de changement. Que ce soit un roi, un philosophe, un
demi-saint ou le président des Etats-Unis, cela ne change pas grand-chose"
» (Fin de l’article de Sandro Magister intitulé « Il y a un étrange prophète à
la Maison-Blanche » publié sur http://chiesa.espresso.repubblica.it/).
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Michel Garroté, Sandro
Magister & Sources citées
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Source principale :
(*) Daniel Pipes sur
l’enfance musulmane d’Obama :
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Autres sources :
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Les livres :
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Le sermon prononcé le
27 mars 2009 par le prédicateur de la maison pontificale, Raniero Cantalamessa,
avec la référence à Obama et à Joachim de Flore :
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Lors de l’audience
générale du mercredi 10 mars 2010, consacrée à saint Bonaventure, Benoît XVI a
parlé de la réapparition de l'utopie de Joachim de Flore dans certaines
tendances progressistes post conciliaires :
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A propos du lien
intellectuel avec Niebuhr affirmé par le président des Etats-Unis :
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Et les critiques de
George Weigel quant au bien-fondé de ce lien :
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L'acte d’accusation
contre le "faux messie" Obama, lu au Vatican par Mgr Michel Schooyans
et l’archevêque Roland Minnerath le 1er mai 2009, peu de temps après la
parution dans "L'Osservatore Romano" d’un éditorial qui faisait
l’éloge de ses cent premiers jours de présidence :
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Et l'éloge encore
plus enthousiaste d’Obama écrit par le cardinal Georges Cottier, théologien
émérite de la maison pontificale, peu de temps avant la visite du président des
États-Unis au Vatican :
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