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Michel Garroté – Je
suis tombé sur une analyse du marxisme et du capitalisme publiée par Marcello Veneziani. Analyse dont je reproduis
ci-dessous quelques extraits. Je ne partage pas sa vision de la société capitaliste mondiale.
Cela dit, je publie son analyse, car elle reste une contribution au travail des
idées si cher à notre blog.
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Or donc, l’écrivain et journaliste italien Marcello Veneziani, dans ‘Il
Giornale’, publiait récemment ceci (extraits adaptés ; lien en bas de page) :
« Marx a gagné et vit avec nous. Ce n'est pas une boutade ou un paradoxe,
c'est la réalité. Le marxisme, séparé du communisme - et son utopie, scindée de
sa prophétie - c'est l'esprit de notre temps. Nous vivons en pleine époque
marxiste. Je ne me réfère pas seulement à la crise économique actuelle, ni au
phénomène prédit par Marx et aujourd'hui effectivement avéré de la richesse
concentrée dans peu de mains, avec une minorité toujours plus riche et
restreinte et une majorité toujours plus large et pauvre. Il nous faut refaire
les comptes avec Marx, et pas seulement parce que nous avons été formés à une
époque - comme l'écrit Dürrenmatt
- où « être marxiste était une espèce de devoir
» - un devoir que nous avons
transgressé. Mais surtout parce que le marxisme imprègne notre aujourd'hui.
Marx écrit dans le Manifeste : « Tous les rapports rigides et stables, avec
leur cortège d'idées et de concepts antiques et vénérables se dissolvent, et
toutes les idées et les concepts nouveaux vieillissent avant de pouvoir se
fixer. Tout ce qui il y avait de corporatif et de stable se volatilise, toute
chose sacrée est profanée, et les hommes sont finalement contraints de regarder
d'un œil désenchanté leur propre position et leurs relations mutuelles ». C'est
la plus précise préfiguration de notre temps. Le marxisme fut le plus puissant
anathème lancé contre Dieu et le sacré, la patrie et les racines, la famille et
les liens avec la tradition; une théorie devenue une pratique généralisée. Sa
mise en œuvre dans les pays pré-modernes comme la Russie et la Chine, le
Cambodge et Cuba, fut une déviation ».
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Marcello
Veneziani : « Contrairement à ce que les gens pensent, le marxisme ne
s'est pas réalisé dans les pays qui ont adopté le communisme, où, au contraire,
il a échoué et a résisté par l'imposition totalitaire et policière; il s'est en
revanche réalisé dans son esprit là où il est né et a été formulé, dans
l'Occident du capitalisme avancé; il n'a pas démonté le système capitaliste,
mais il a été l'assistant social et culturel dans le passage de l'ancienne
société christiano-bourgeoise au néo-capitalisme nihiliste et global. La
société de consommation, des désirs et des mondes virtuels a réalisé, dans la
liberté, la tâche et la définition que Marx a donnée du communisme : « C'est le
mouvement réel qui abolit l'état actuel des choses ». L'utopie communiste a été
réalisée au niveau planétaire, mais sur le plan individuel, et non pas
collectif, comme le pensait Marx. Sous le signe de l'individualisme de masse,
et non pas du communisme et de son abolition de l'État, de la propriété privée
ou des inégalités. Cette lecture individualiste de Marx ne doit pas
déconcerter. Dans ‘l'Idéologie
allemande’, Marx déclare que la finalité suprême du communisme, « c'est
la libération de chaque individu » des limites locales et nationales,
familiales et religieuses, économiques et propriétaires. Le jeune Marx honore
un seul saint dans le calendrier: Prométhée,
l'individu héroïque et libérateur. L'un des premiers à découvrir l'essence
individualiste qui se cachait à l'intérieur de l'écorce collectiviste de Marx
fut Louis Dumont
dans Homo aequalis ».
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Marcello
Veneziani : « La société capitaliste mondiale a réalisé les
principales promesses du marxisme, même si elle les a déformées : dans la
mondialisation, elle a réalisé l'internationalisme contre les patries ; dans
l'uniformité et l'uniformisation (en italien, les deux mots sont uniformità et
omologazzione), elle a réalisé l'égalité et le nivellement universel ; dans la
domination globale du marché, elle a reconnu la primauté mondiale de l'économie
posée par Marx; dans l'athéisme pratique et dans l'irreligion, elle a réalisé
l'athéisme marxien et sa critique de la religion ; dans la primauté des
rapports matériels, pratiques et utilitaires sur les valeurs spirituelles,
morales et traditionnelles, elle a réalisé le matérialisme marxien ; dans la
libération de tout lien organique et naturel, elle a réalisé le prométhéisme marxien
dans la sphère individuelle ; dans la société libertine et permissive, elle a
réalisé la libération marxienne des liens familiaux et matrimoniaux ; et comme
Marx l'a voulu, elle a réalisé le primat de la pratique sur la pensée » (Note
de Michel Garroté : la « société capitaliste mondiale » décriée
par Marcello Veneziani, n’est pas, selon moi, ce qu’il en dit ; j’ai
publié un document qui peut éclairer nos lecteurs sur ce point : Gauche démoniaque et libéralisme judéo-chrétien).
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Marcello
Veneziani : « Le marxisme qui a échoué comme appareil répressif à l'Est, s'est
réalisé comme radicalisme permissif à l'Ouest, se détachant du communisme
anti-capitaliste, messianique et prophétique. Et il se réalise actuellement
dans l'Extrême-Orient, en Chine et en Corée, sous la forme du MAO-capitalisme,
le communisme libéral. La poussée idéologique du marxisme se condense sous la
forme de mentalité; son avant-garde intellectuelle assume le contrôle du
pouvoir culturel, comme une secte jacobine qui surveille la conformité au
politiquement correct; tandis que dans les relations sociales et économiques,
le marxisme se conforme à la société globale et néo-capitaliste de masse ».
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Marcello
Veneziani : « Dont il a finalement été la Garde Rouge, afin de
superviser le retrait de la Tradition. L'esprit du marxisme se réalise en
Occident, se faisant idéologiquement radical, et économiquement libéral. Il a
perdu les tons violents du marxisme - la sanglante lutte des classes et la
dictature du prolétariat - abandonnés aux révolutions du Tiers-Monde et aux
franges extrêmes de l'Occident ; mais avec eux, il a perdu aussi le désir de
justice sociale et l'enracinement dans le prolétariat et dans la classe
ouvrière. La société de masse de l'Occident a accompli la prédiction de Marx:
la prolétarisation de la classe moyenne, mais après l'embourgeoisement du
prolétariat. La bourgeoisie s'universalise comme mode de vie et modèle, mais
son expansion coïncide avec l'abaissement de son statut socio-économique au
rang de prolétariat. Ce que Marx n'avait pas compris, c'est que le désenchantement,
la sécularisation, l'athéisme n'épargneraient pas même le communisme et sa
veine eschatologique et prophétique. Finalement, le communisme de l'Est a été
vaincu par le marxisme occidental, avec son matérialisme pratique, son
irréligion et sa primauté de l'économie qui ont déraciné plus que dans les
sociétés communistes la semence vitale des principes et de l'ordre
traditionnels. Ce n'est pas par hasard que les marxistes occidentaux se sont
convertis à l'esprit radical et libéral, à l'individualisme, au marché et la
libération sexuelle, se défaisant de la libération sociale. La lutte de classe
a cédé la place à la lutte de bioclasse, au nom de l'antisexisme et de
l'antiracisme. Même la défense égalitaire des masses de pauvres a cédé à la défense
prioritaire des « différents ». Le marxisme reste actif sous un faux nom et une
fausse identité, presque comme un OGM, comme esprit de dissolution de la
réalité et de son sens, du sacré et du fondement, des principes et des
structures sur lesquelles s'est fondée la société traditionnelle. La fin du
marxisme, longtemps déclarée, est un cas de mort apparente », conclut Marcello
Veneziani (ci-dessous, lien vers les versions - italophone et francophone - du texte).
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Michel Garroté
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