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mardi 17 novembre 2009

Dans le secret des services (1ère partie)

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Michel Garroté

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Novembre 2009

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Journaliste mais pas secret

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Contrairement à une idée très répandue, une part importante de l’activité des services secrets n’est pas secrète du tout. Contrairement à une deuxième idée très répandue, les agents secrets en savent parfois moins que certains journalistes et que certains hommes d’affaires. Et contrairement à une troisième idée très répandue, le premier contact avec le monde du renseignement n’est pas forcément prémédité et planifié. Ce sont ces trois réalités-là que j’expérimente depuis 1977, soit depuis trente-deux ans exactement, comme d’ailleurs d’autres journalistes l’expérimentent aussi. Or, il se trouve que l’histoire passée éclaire l’histoire présente. Et il se trouve aussi que l’histoire passée aide à préparer l’histoire de demain.

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C’est dans cet esprit - très concret et très simple - que j’avais promis aux lecteurs de mettre, un jour, quelques anecdotes sur le papier. C’est désormais chose faite (ou commencée...) ci-dessous, sans la moindre prétention, et sans la moindre gêne. Pour les faits énoncés ici - et dans les épisodes à paraître - je n’ai pas jugé utile de changer les noms des lieux et les noms des personnes (à l'exception de « Cedar » pour des raisons que le lecteur comprendra de lui-même). D’abord, car il n’y avait là rien d’illégal. Et en suite, car même en admettant que tout n’ait pas toujours été légal à certaines époques, il y a, de toute façon, aujourd’hui, prescription. Et en l’écrivant ainsi, mon récit reste d’autant plus réaliste et d’autant plus crédible.

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Plutôt que de livrer aux lecteurs le récit qui débute ici en le limitant aux réalités que j’ai personnellement et directement expérimentées, j'ai préféré y insérer quelques éléments de l’histoire, notamment de l’histoire de la Guerre froide et de l’histoire de la Guerre contre la Terreur. C’est du reste en cela que mon récit - du moins je le souhaite - éclaire l’histoire présente et aide, peut-être, à préparer l’histoire de demain.

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Le premier contact avec le monde du renseignement - je l’ai écrit ci-dessus - n’est pas forcément prémédité et planifié. Et par conséquent, ce premier contact n’est pas forcément une expérience extraordinaire. Je reconnais volontiers que des personnes ont été et sont encore intentionnellement recrutées lors d’un premier contact effectué par un service de renseignement. Mais j’affirme que cela n’a jamais été mon cas.

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Le premier contact est parfois le résultat de circonstances que personne, pas même un agent du renseignement, n’a orchestrées dans l’ombre. Ainsi, pour ce qui me concerne, les contacts avec les femmes et les hommes du renseignement furent et restent beaucoup moins exaltant qu’un film de James Bond ou que les activités passées de Tsipi Livni au Kidon (à ce propos, le 29 juillet 2008, l’agent spécial brieli67, sur Agoravox, a écrit, que drzz, donc Daniel Zillevic, et moi-même, ne serions qu’une seule et même personne, ce qui est faux ; brieli67 a en outre écrit que je suis un retraité militaire, ce qui encore faux ; que je suis un kidon, ce qui est toujours faux ; et que j’agis à partir de la Suisse, ce qui est parfaitement exact).

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La première fois que je suis entré dans le jeu du renseignement, de l’information, de la désinformation, de l’agitation et de la propagande, j’avais 21 ans et j’étais aux études universitaires, en science politique, à Genève (Suisse). A cet époque, non seulement je n’étais pas un ami d’Israël. Mais bien au contraire, je soutenais la révolution palestinienne. Une révolution concoctée par les éléments de la tendance marxiste au sein de l’OLP, avec le KGB soviétique et avec la Stasi est-allemande, notamment le brillant espion communiste Markus Wolf (cf. le documentaire « La Guerre des Loups », France 3).

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La première fois, c’était en 1977 dans un appartement à Saint-Julien-en-Genevois en France près de Genève (ville où j’habitais, en Suisse) ; un appartement à Saint-Julien-en-Genevois occupé par des Libanais totalement acquis à la révolution palestinienne, totalement acquis à Arafat et totalement acquis à l’OLP. Je fis l’aller-retour Genève / Saint-Julien-en-Genevois en passant tout naturellement la frontière. Les Libanais me remirent une série de documents que je ramenai en Suisse.

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Sur la page de couverture de chacun de ces documents figurait, en grand, le sigle de l’ONU. Le contenu de ces documents portait de graves accusations contre Israël. Ce que je n’avais pas saisis à l’époque - naïveté juvénile ? - c’est que ces documents étaient imprimés et diffusés, non pas par l’ONU, mais par la Ligue arabe. En ce temps-là, mon père était diplomate dans une organisation internationale à Genève, et comme d’autres, je portais sottement crédit à tout texte qui arborait le sigle de l’ONU (du fait de l’activité de mon père, je bénéficiais, par extension, de l’immunité diplomatique, ce qui me mettais très à l’aise lorsqu’il fallait passer la frontière). Les documents en question n’avaient strictement rien de secret. C’était même un peu grotesque d’avoir été en France voisine depuis Genève pour les réceptionner. En revanche, ils demeuraient un fantastique outil de propagande au service de la révolution palestinienne.

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A cette même époque, je fis la connaissance, à Genève, de Lea Tsemel et de Eytan Grossfeld, qui travaillaient, officiellement, pour une organisation israélienne des droits de l’homme. Ils travaillaient aussi, mais ça, c’était beaucoup moins officiel, pour un mouvement israélien d’extrême-gauche qui prônait la transformation de l’Etat d’Israël en une Confédération israélo-palestinienne où les Juifs et les Arabes étaient supposés s’embrasser sur la bouche, chanter quelque chose comme cumbaya je crois et manger des mochemaloe (j’écris ce mot en phonétique française car c’est plus drôle), des mochemaloe passés au barbecue.

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Toujours à cette même époque, à Genève, je fis la connaissance d’un étudiant en psychologie, Georges Hoefflin, qui était membre d’un groupe clandestin ultragauchiste, le Centre de Liaison Politique (CLP), groupe qui diffusait Le Militant, un journal faisant l’apologie du terrorisme palestinien (le FPLP etc.) et allemand (la Rote Armee Fraktion, la bande à Baader). C’était en 1977 (cf. le documentaire « Détournement d'avion pour la bande à Baader », Arte). Je faisais partie d’une jeunesse universitaire qui trouvait dans le soutient à la lutte armée, en clair au terrorisme, un motif d’exister, et un motif de participer, soi-disant, au cours de l’histoire.

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Le fait qu’à la même époque, des millions et des millions de personnes humaines souffraient terriblement - et en silence - de l’autre côté du rideau de fer, rideau tiré de la mer Baltique à la mer Adriatique, ce fait-là ne semblait pas nous émouvoir le moins du monde (cf. le documentaire « Radio Free Europe : la guerre des ondes », Arte). Nous voulions notre petite révolution à nous, quitte à faire le jeu du KGB. Nous ne songions pas à la Guerre froide. Nous rêvions de guerre anti-impérialiste. Les jeunes occidentaux qui aujourd’hui se convertissent à l’islam radical et adhèrent à Al-Qaïda sont à peu près aussi crétins que nous-mêmes étions crétins à l’époque.

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Avant que je n’oublie, je tiens à ouvrir ici une parenthèse : le titre de cette série d’articles - « journaliste mais pas secret » - ce titre est volontairement provocateur, puisqu’à gauche, on écrit que je suis un agent du Mossad (or je n’ai pas cet honneur) et toujours à gauche, on écrit aussi que je travaille pour l’ambassade israélienne en Suisse (or je n’ai pas non plus cet honneur-là).

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En réalité, je ne suis pas un agent sioniste. Je diffuse sur Israël des informations vraies que les médias européens ne diffusent pas. Je suis ouvertement ami du peuple juif et ouvertement ami d’Israël. Mais je ne suis pas un agent sioniste. Car si quelqu’un comme moi est soi-disant un « agent sioniste », alors dans ce cas, les journaleux de l’Agence subventionnée France Presse sont tous des « agents palestinnistes », des « agents fatahistes » et même des « agents hamassistes ».

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Or donc, j’étais en train d’écrire que j’ai eu une courte période ultragauchiste (1977) résumée dans la première partie de la présente série d’articles. De 1978 à 1979, je suis progressivement sorti des arcannes ultragauchistes. Les incessantes dissensions internes et les incessantes querelles internes entre tout ces ultragauchistes, ainsi que leur affolante médiocrité intellectuelle, m’avaient suffisamment irrité pour que je prenne peu à peu mes distances (Je garde cependant un excellent souvenir du sociologue Blaise Galland qui lui au moins avait un cerveau).

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Je tombais en ce temps-là, je ne sais plus trop comment d’ailleurs et peu importe, sur un livre de l’avocat péruvien, également chroniqueur au quotidien El Comercio, Alfonso Baella Tuesta. Le livre de Alfonso Baella Tuesta est intitulé « El poder invisible » - en français cela signifie le pouvoir invisible - et ce livre a été publié, en espagnol, en 1977 aux éditions Andina.

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Ce livre constitua à l’époque une magistrale et accablante investigation, avec pièces à conviction à l’appui, sur l’infiltration de la gauche latino-américaine par les services secrets cubains et donc aussi - par la force des choses - l’infiltration de la gauche latino américaine par les agents des services secrets soviétiques et est-allemands qui téléguidaient les réseaux castristes.

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Le livre d’investigation de l’avocat journaliste Alfonso Baella Tuesta m’avait retourné, dans tout les sens du terme. Et dans la gauche universitaire genevoise, avec ses nombreux « réfugiés politiques » latino-américains, en clair des militants d’extrême-gauche pas très démocrates, on m’en voulut à mort. Non seulement je n’étais plus vraiment ultragauchiste. Mais en plus j’étais en passe de devenir un anticommuniste convaincu.

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Je mis du temps à sortir des idéologies ultragauchistes et anarchistes, mais cela ne m’empêcha pas de mener jusqu’au diplôme (1979) mes études en Science politique, d’une part, à l’Université de Genève ; et d’autre part, à l’Institut Universitaire de Hautes Etudes Internationales (IUHEI), également à Genève. En 1980, les événements se précipitèrent, c’est le moins qu’on puisse dire.

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En 1980, d’une part, le responsable de la Mission des Forces Libanaises pour l’Europe, Mission basée à Lausanne, en Suisse (à l’époque, cette mission avait plus de poids que n’importe quelle ambassade libanaise), responsable que je nommerai ici Cedar (car dans ce cas bien précis je ne puis révéler la véritable identité), Cedar me demanda de devenir son attaché de presse.

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J’avais fait la connaissance de Cedar par l’intermédiaire de sa sœur, qui étudiait avec moi à l’Université. La sœur de Cedar, une chrétienne libanaise à la fois pleine de charme et extrêmement intelligente, avait substantiellement (et néanmoins chastement) contribué à me faire quitter les eaux troubles de l’OLP et Consorts pour faire de moi un ami des chrétiens du Liban.

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La sœur de Cedar étudiait à Genève et résidait chez ses parents et ses trois frères juste de l’autre côté de la frontière suisse, à Ferney-Voltaire, en France. Sans cette famille, je serais peut-être resté un ultragauchiste pour quelques années encore.

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D’autre part, la même année 1980, le rédacteur en chef du mensuel anti-communiste L’Impact, Valentin Philibert (c’était bien son vrai nom), me proposa de devenir rédacteur dans une agence de presse internationale qu’il venait de créer à Genève, l’agence Voxmundi S.A. Valentin Philibert était de père suisse et de mère russe. Il avait brillamment réussi dans une maison d’édition genevoise de revues horlogères, la maison d’édition Hugo Buchser.

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En parallèle, Valentin Philibert avait lancé la revue L’Impact, puis l’agence Voxmundi. Je tombais sur Valentin Philibert le plus bêtement du monde, en lisant sans faire exprès une annonce dans la Tribune de Genève, un quotidien qu’il m’arrivait de lire une fois tout les six mois.

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J’acceptais les deux mandats, celui de Cedar avec les Forces Libanaises et celui de Valentin Philibert avec Voxmundi S.A. J’ignorais totalement que ce faisant, j’allais en réalité travailler à la fois avec le Deuxième bureau (service de renseignement) des Forces Libanaises et avec le service de renseignement de l’armée argentine. Non seulement je n’allais pas me ranger comme je l’avais imaginé. mais au contraire j’allais sérieusement aggraver mon cas au regard du politiquement correct.

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Il se trouve que Sarah K., qui a rédigé un document sur les services de renseignements, m’a écrit ceci (extraits) : « …Quand les journalistes en savent trop on leur fait subir des tensions telles qu'ils sont obliger de renoncer. Certains arrivent encore à effectuer leur travail correctement et pour ceux qui travaillent dans l'ombre et pour les même services dans l'intérêt du leur pays. Mais question : je me demande s’ils ont le choix du libre arbitre ? Ont-ils vraiment le droit de faire leur propre enquête ? Où ne sont-ils pas influencés par ces mêmes services qui ce servent d'eux dans le seul but d'acquérir plus de pouvoir afin d'exécuter des pressions sur tel ou tel pays pour éventuellement renverser un régime en place ? N'avez-vous jamais eu le désir ou la curiosité de savoir ce que vous transportiez et pourquoi avoir accepté d'entrer dans le jeu du renseignement, de l'information, de la désinformation, de l'agitation et de la propagande ? Et pensez-vous réellement avoir participer, soi-disant, au cours de l'histoire ? N'avez vous pas, aussi été trompé, manipulé, endoctriné par un gouvernement qui ce sert le plus souvent des jeune universitaires pour arriver à leur fin ?… » (fin des extraits du message de Sarah K.).

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J'aimerais répondre à l'une des questions posées ci-dessus par Sarah K. J'aimerais répondre, par la négative, à la question de la participation au cours de l’histoire. Un ultragauchiste en 1977, soit en pleine période de terrorisme, notamment de terrorisme palestinien et allemand (cf. le documentaire « Détournement d'avion pour la bande à Baader », Arte), un ultragauchiste à cette époque, et ce fut bel et bien mon cas en 1977, avait l’illusion grotesque de participer au cours de l’histoire. Alors qu’il était endoctriné, et que j'étais moi aussi endoctriné, par le KGB, par la Stasi et par l’OLP et Consorts (FPLP etc.).

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Mais revenons à nos moutons. Je travaillais donc dès 1980 comme attaché de presse pour Cedar, le Représentant officiel pour l’Europe des Forces Libanaises, avec ses bureaux, situés Avenue du Rond Point, à Lausanne, en Suisse. Et je travaillais, dès la même année 1980, comme journaliste pour Valentin Philibert (c’était bien son vrai nom), Directeur l’Agence de presse internationale Voxmundi S.A., établie Rue des Glacis de Rive, à Genève, en Suisse également. La priorité de l’Agence de presse internationale Voxmundi S.A. était de diffuser à la presse européenne des dépêches d’agence factuelles et objectives sur des pays, d’une part, menacés par le communisme soviétique ; et d’autre part, systématiquement dénigrés par les médias. Parmi ces pays l’on pouvait compter divers Etats, tels par exemple Israël, l’Afrique du Sud ou l’Argentine.

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En outre, à Voxmundi, nous avons à l’époque édité et diffusé, sous forme de livre, « Les stratèges de la peur : vingt ans de guerre révolutionnaire en Argentine », une enquête sur les réseaux terroristes communistes argentins réalisée par Pierre de Villemarest. Qui était cet homme de l’ombre ? En 1940, Pierre de Villemarest, âgé de 17 ans, fonda La Dernière Colonne qui apporta à Emmanuel d'Astier sa coopération pour le mouvement de résistance Libération. En 1941, Pierre de Villemarest prit ses distances de ce dernier, refusant de coopérer avec les communistes. En 1943, Pierre de Villemarest servit dans l'Armée secrète. Créant un réseau de renseignement, il travailla au sein du réseau Galien. Pendant deux ans, il fut traqué par la Gestapo. De juin à septembre 1944, Pierre de Villemarest commanda au feu un Groupe Franc et obtint à ce titre plusieurs médailles.

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Après la guerre, Pierre de Villemarest participa à la dénazification de l'Allemagne. Il fut aussi en poste au bord du lac de Constance, dans ce goulot d’étranglement entre l’Allemagne (Lindau), l’Autriche (Bregenz) et la Suisse (Skt-Gallen), pour intercepter les agents secrets allemands qui tentaient d’obtenir un Laissez-passer de la Croix Rouge leur permettant de filer en Amérique latine et au Moyen Orient (cf. le documentaire « La Guerre des Loups », France 3). En 1950, il quitta les services de renseignements et commença à travailler comme journaliste. Cela, c’est côté face. Côté pile, le parcours est très différent : Pierre de Villemarest était le gendre du docteur Henri Martin, un des fondateurs de la Cagoule. Pierre de Villemarest a aussi été proche de l’OAS pendant la guerre d’Algérie. En 1970, il fonda le Centre Européen d'Information et en 1972 il lança une lettre confidentielle portant son nom.

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Pour dire les choses clairement, Pierre de Villemarest, au plan politique, était proche du Front National et proche de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X. J’ai rencontré Pierre de Villemarest à plusieurs reprises entre 1980 et 1998. Il est décédé en 2008. En 1980, il nous donna un coup de main avec son enquête « Les stratèges de la peur : vingt ans de guerre révolutionnaire en Argentine ». Cela dit, je considérais Pierre de Villemarest comme un paranoïaque, obsédé par les soi-disant complots en général et par les soi-disant complots mondialistes en particulier (CFR, Trilatérale, etc.). Ces théories fumeuses sur les soi-disant complots, à l’époque très prisées par l’extrême-droite, sont reprises aujourd'hui, en 2009 (30 ans plus tard…), par la blogosphère d’extrême-gauche. A ma connaissance, la seule analyse sérieuse écrite, à ce jour, sur le CFR et la Trilatérale est celle de Michel Gurfinkiel (« De Bilderberg à Téhéran »).

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Bref, j’admirais le rôle de Pierre de Villemarest dans la résistance contre les nationaux-socialistes pendant la Deuxième guerre mondiale. J’admirais aussi ses connaissances sur le KGB, le GRU et la Stasi. En revanche, je le suspectais d’en rajouter volontairement sur le mondialisme, afin de plaire à ses lecteurs, en majorité d’extrême-droite et catholiques traditionalistes. Ses lubies sur Israël et sur les USA m’agaçaient franchement. Elles m’agaçaient d’autant plus qu’à le même époque, je travaillais avec les Forces Libanaises et qu’à ce titre j’avais des contacts avec les Israéliens.

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L’idée de Voxmundi, en théorie, était sans doute une bonne idée. En pratique, cette idée restait cependant une idée peut-être naïve. Car la presse écrite était réticente à reprendre les dépêches d’une agence de presse internationale fondée par le Rédacteur en Chef de l’Impact, un magazine mensuel qui osait s’afficher pro-israélien, et en plus anticommuniste, un péché grave à l’époque. L'Impact et Voxmundi diffusaient des informations factuelles et objectives, sur des pays mal vus dans les médias, tels que Israël, l’Afrique du Sud ou l’Argentine (mais aussi sur certains pays musulmans, ce qui à mon sens, était une erreur ; mais il est vrai qu'à l'époque personne, à part Bat Ye'or, n'avait anticipé les concepts de jihad et de califat, n'est-ce pas...).

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Voxmundi informait sur des pays dont les dirigeants de l’époque étaient conspués par la gauche occidentale. Mais des pays qui, en même temps, au plan géostratégique, ne devaient en aucun cas tomber dans le giron soviétique, sous peine de voir le Monde libre perdre des alliés de premier plan face à l’expansionnisme de l’URSS. A cet égard, Israël était - et reste - la seule véritable démocratie de tout le Proche et de tout le Moyen Orient, excepté peut-être l’Irak depuis peu et encore...

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L’Afrique du Sud était le seul pays ou un des rarissimes pays - en dehors de l’URSS - à produire des matières premières stratégiques comme par exemple le chrome, le vanadium, le titane, le manganèse, l’uranium, le nickel, etc. L’Argentine était - et demeure - un pays clé d’Amérique du Sud ; et qui plus est, un pays avec accès direct au cône sud de continent américain ; et avec accès direct à l’Antarctique et ses richesses, manganèse, nickel, etc. ; accès direct à l’Antarctique comme d’ailleurs pour l’Afrique du Sud, car, l’aurait-on oublié, la terre est ronde ?

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Or donc, précisément dès ces années 1980, des accords stratégiques secrets lièrent Israël, l’Afrique du Sud et l’Argentine. Je rencontrais dans ce cadre et pour mon travail de journaliste des représentants de ces trois pays. Le cas d’Israël, à l’époque gouverné par Menahem Begin du parti Likoud, était particulièrement intéressant, et de fil en aiguille, je tissais d’étroits contacts avec l’Etat hébreu. En cette période, les plus importantes initiatives - contestables ou pas contestables, mais importantes - de Menahem Begin furent primo les Accords de Camp David avec le président gauchiste et obtus Jimmy Carter (un jour Begin montra à Carter sur une carte les 9 miles qui séparent, d’une part, Netanya en Israël au bord de la mer ; et d’autre part, la ville palestinienne de Tulkarem sur le tracé de la Judée Samarie ; mais Carter ne savait pas et ne sait toujours pas lire une carte).

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Et secundo, dans le sillage des Accords de Camp David, Begin conclut le Traité de paix israélo-égyptien avec le président égyptien Anouar El Sadate et avec l’ineffable Carter. Ainsi donc, Begin procéda au retrait israélien du Sinaï. Sadate avait obtenu un vaste territoire en échange d’un petit bout de papier. Pour « compenser » aux yeux des musulmans la paix avec Israël, Sadate intensifia les persécutions contre les chrétiens coptes d’Egypte. La femme de Sadate tenta de s’enrichir en faisant du business avec des Israéliens. Puis, Sadate fut assassiné par des militaires égyptiens. Mes amis au Ministère israélien des Affaires étrangères me dirent en souriant qu’avec l’Egypte, Israël était passé de la paix froide à la guerre froide.

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Par ailleurs, Begin eut le bon sens de prendre au sérieux l'antisionisme et l'antisémitisme très concrets du dictateur sanguinaire Saddam Hussein. En 1981, Begin ordonna le bombardement du réacteur nucléaire irakien de Tammuz, dit « Osirak » (construit grâce à Giscard et Chirac), par l'aviation israélienne. La stratégie de Begin, dont on ferait bien de se souvenir aujourd’hui face au nucléaire offensif iranien, cette stratégie était très claire : « À aucun prix Israël ne permettra à un ennemi de développer des armes de destruction massive qu'il pourrait utiliser contre notre peuple ». C’est ce que dit, depuis 2006, Nathan Sharansky à propos du président iranien et sa clique de mollahs génocidaires.

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En 1982 Begin autorisa Tsahal à intervenir au Liban pour y déloger l’énorme infrastructure militaire de l'OLP, infrastructure qui pilonnait la moitié Nord d'Israël, un précédent palestinien à la stratégie du groupe terroriste libanais Hezbollah. Begin fut profondément affecté et déçu par la versatilité des Libanais. Begin avait désiré établir la paix avec le président chrétien libanais Béchir Gemayel, issu des Forces Libanaises et démocratiquement élu par le peuple libanais. Hélas, celui-ci fut assassiné par les Syriens. Samir Geagea et Elie Hobeïka prirent la relève à la tête des Forces Libanaises. Et l’espérance d’une paix entre Israël et le Liban disparut à jamais. L’affaire de Sabra et Chatila, amplifiée et médiatisée à souhait, fut un autre coup dur pour Begin. Ensuite, Begin fut meurtri par la mort subite et inattendue de sa femme Aliza, mort survenue alors que Begin était en visite aux USA.

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Begin se retira de la politique à l’été 1983 et passa le gouvernail à son frère d'armes Yitzhak Shamir. Begin devint alors un homme retiré dans la solitude choisie et dans la prière. Il est décédé en 1992. Critiqué de son vivant, Begin passe aujourd’hui pour l’un des meilleurs chef de gouvernement de l’histoire d’Israël.

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Via l’agence de presse Voxmundi, je rencontrais en 1980 l’ambassadeur d’Afrique du Sud en Suisse, et son attaché de presse, dans un restaurant au bord du lac Léman à Genève. Je n’étais pas personnellement un défenseur de l’apartheid. Pour moi, ce système de ségrégation n’était pas viable à long terme. Cela dit, je trouvais un peu sommaire de réduire la question globale de l’Afrique australe en général à la question spécifique de l’apartheid en Afrique du Sud. L’URSS était parvenue à mettre le grappin sur le Mozambique et sur l’Angola, pas très éloignés de l'Afrique du Sud...

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En Afrique du Sud, l’opposition noire était concentrée en majorité entre les mains de l’ANC communiste. Dans ce contexte, il était irresponsable de diaboliser l’Afrique du Sud tout en fermant les yeux sur les deux colonies soviétiques qu’étaient devenues le Mozambique et l’Angola. Dans ces deux pays, les troupes cubaines, les instructeurs est-allemands et le KGB représentaient une menace indiscutable pour l’Afrique du Sud ainsi d’ailleurs que pour la Namibie.

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Céder toute l’Afrique australe à l’URSS eut été criminel. Les télévisions occidentales filmaient régulièrement l’évêque sud-africain Desmond Tutu au cours de manifestations. Mais les télévisions occidentales filmaient toujours Mgr Desmond Tutu de très près. Pourquoi ? Parce qu’un plan élargi aurait montré les dizaines et les dizaines de drapeaux rouges communistes arborés lors de ces manifestations. Les médias occidentaux, l’ONU (avec le bloc soviétique, et avec les non-alignés, souvent alignés sur Moscou) et le Conseil Oecuménique des Eglises (à l’époque infiltré par un pseudo-clergé russe orthodoxe aux ordres KGB) faisaient passer une cause crypto-soviétique (la victoire de l’ANC) pour une cause chrétienne (Mgr Desmond Tutu). Alors que les soviétiques pratiquaient leur forme à eux d’apartheid au sein même de l’URSS et que cela n’émouvait personne. L'évêque crypto-communiste Desmond Tutu fut, aussi, le promoteur de la notion d'apartheid en Judée Samarie, notion dont Jimmy Carter s'est par la suite fait l'apôtre zélé.

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Je n’eus pas d’autres contacts avec les Sud-Africains. J’écrivis simplement quelques articles sur l’enjeu géostratégique de l’Afrique australe. Pour le reste, notamment pour l’apartheid, j’étais dès le début convaincu que ce système allait disparaître. Je note en passant que contrairement à l’ex-Rhodésie (devenue Zimbabwe), l’Afrique du Sud, elle, a réussi son passage à la démocratie et n’a pas sombré dans le chaos. Nelson Mandela était communiste mais il n’était pas génocidaire comme le zimbabwen Robert Mugabe.

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En 1981, au bureau de Voxmundi, je tombais, par accident et avec stupéfaction, sur un document interne mettant en exergue le budget alloué par les services de renseignement militaires argentins à l’agence Voxmundi. Or, je ne fonctionnais pas et je ne fonctionne toujours pas comme ça. Certes, j’étais jeune, je sortais de l’université, c’était mon premier job, mais tout de même, cette découverte me persuada que Voxmundi n’avait pas d’avenir. Je contactais alors spontanément le groupe Nestlé, établi à Vevey, en Suisse, pour un job éventuel. Et je continuais de donner de temps en temps un coup de main, à titre amical, à Cedar, le Représentant officiel pour l’Europe des Forces Libanaises. C’est dans ce contexte que je rencontrais Ovadia Soffer, ambassadeur d’Israël auprès du Bureau européen de l’ONU à Genève.

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Cedar m’avait fait rencontrer deux historiens, David Littman et Bat Ye’or, d'abord à l’université de Genève, et plus tard, dans leur maison sur la côte lémanique. Puis je rencontrais Ovadia Soffer, à la mission permanente d’Israël auprès de l’ONU à Genève. Nous sommes tombés d’accord avec l'ambassadeur Ovadia Soffer pour que Cedar et moi nous rendions avec Middle East Airlines, depuis Genève, à Beyrouth, où je rencontrais Walid Fares, aujourd'hui membre de la Foundation for Democraties ; et pour qu'ensuite, depuis Beyrouth, en voiture, nous nous rendions à Jérusalem. C’était fin mars - début avril 1983. C'est à ce moment-là que Cedar me confia qu’il travaillait aussi pour le Deuxième bureau (service de renseignement) des Forces Libanaises.

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En 1983, Elie Hobeïka, du Deuxième bureau des Forces Libanaises, était en relation avec les Israéliens (Hobeïka retourna par la suite sa veste et devint pro-syrien). En 1983, à Beyrouth, Cedar m’a certifié qu’Hobeïka, et les éléments des Forces libanaises qu’Hobeïka contrôlait, furent les responsables des événements de Sabra et Chatila en 1982. J’ai visité Sabra et Chatila en 1983. Sabra et Chatila n’étaient pas simplement des camps de réfugiés palestiniens. L’ensemble 'Sabra et Chatila' était surtout une banlieue de Beyrouth. Plus exactement, l'ensemble 'Sabra et Chatila' était une ville dans la ville ; un Etat dans l’Etat.

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Dans les sous-sols ou plutôt, les galeries souterraines de Sabra et Chatila, l’OLP avait caché une quantité inouïe d’armes lourdes et légères. Un aspect de Sabra et Chatila qui n’a jamais intéressé mes confrères. Je n’oublierai jamais ce que j’ai vu au Liban en 1983. J’ai parcouru le pays dans presque tous les sens. Au vu du nombre invraisemblable de milices armées de toutes sortes et malgré la tentative de Bachir Gemayel (assassiné en 1982) d’unifier les éléments armés chrétiens sous le commandement des Forces libanaises, je ne vois pas comment, l’armée israélienne, aurait pu, dans ce chaos généralisé, maîtriser toutes les situations, y compris celle de Sabra et Chatila.

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Partis de Beyrouth, la nuit, en voiture, direction Israël, Cedar et moi sommes involontairement sorti de la route éventrée par les obus (et inutilement encombrée par les inutiles camions de la FINUL) à hauteur de Saïda. Sans le vouloir, nous avons traversé un champ de mines, pas loin d’une antenne du Comité International de la Croix Rouge. Dans la matinée nous sommes arrivés à la frontière, à Rosh Hanikra, où nous avons laissé la voiture, pour franchir, à pied, la ligne frontalière, avant d’être pris en charge, par une autre voiture, côté israélien.

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Le poste israélien de contrôle n’était pas une douane puisque le Liban ne reconnaît pas l’Etat d’Israël. C’est du reste la raison pour laquelle l’ambassadeur d’Israël Ovadia Soffer nous avait indiqué qu’à un moment donné, à hauteur de Rosh Hanikra, nous tomberions sur un poste israélien de contrôle, à la frontière. Et Ovadia Soffer nous avais simplement précisé qu’à ce poste de contrôle, il y aurait un certain Alex - du Mossad - pour nous identifier. Des filles scouts israéliennes vérifièrent nos bagages. Je me mis à rire car nous n’étions vraiment pas des terroristes transportant des grenades dans notre trousse de toilette.

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La responsable des scouts, une jeune sabra de 16 ans environ, légèrement froissée par mon rire, me dit, en français, avec l'accent hébreu : « Nous ne faisons que notre devoir monsieur ». Ce furent pour moi les premiers mots sortis de la bouche d’une personne de nationalité israélienne : « Nous ne faisons que notre devoir monsieur ». Cedar me regarda l’air de dire : « Chez nous au Liban c’est la pagaille, mais ici ça à l’air de bien fonctionner ». Alex, du Mossad, assis à quelque mètres de nous, souriait sans broncher. Un certain Yizak nous pris en charge, dans sa voiture, pour nous rendre à Jérusalem.

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Lors du trajet de nuit de Beyrouth-Est à Rosh Hanikra, nous n’avions vu et humé que la ruine, les décombres, les cratères d’obus, cette odeur persistante de poudre à canon et de cadavres. Nous avions mis six heures pour parcourir une distance ridicule, un peu plus de 100 km, six heures à cause des innombrables barrages de miliciens qui contrôlaient les véhicules à Beyrouth, à Tyr, à Saïda et ailleurs au Sud-Liban. Je ne me souviens même plus des milices tant elles étaient nombreuses : les Forces Libanaises, la milice Amal du chiite Nabih Berri, les Druzes de Walid Joumblatt, l’Armée du Sud-Liban de Haddad, sans compter les clowns de la Force multinationale et les pingouins de la Finulle.

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Des hauteurs de Rosh Hanikra, Yizak nous fit descendre dans sa voiture en Galilée. Après les horreurs libanaises, je vis la plaine fertile de Galilée et la Méditerranée sous un magnifique soleil. Ce fut mon tout premier coup d’œil sur la terre d’Israël. Vers midi, nous arrivâmes à Jérusalem où nous avions rendez-vous pour le déjeuner avec Shlomo Bino et Asher Naïm, du ministère des Affaires étrangères, à l'époque dirigé par Yizak Shamir, sous le mandat du Premier ministre Menahem Begin.

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Cedar et moi déjeunâmes au Jerusalem Hilton avec Shlomo Bino, directeur pour le Moyen Orient au ministère des Affaires étrangères et Asher Naïm, porte-parole du même ministère. Shlomo Bino, un homme corpulent, au teint buriné, était d’origine juive irakienne. Asher Naïm, petit blond maigre aux yeux bleus était d’origine juive libyenne.

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Shlomo Bino commanda une goulasch en marmonnant qu’il n’avait jamais goûté un truc pareil. Je décidais de poser mes cartes sur la table : pas de négociations avec Arafat ; une alliance avec les Forces Libanaises ; pas de concessions sur la Judée-Samarie ; et envisager à moyen terme un Etat palestinien en Jordanie. Asher Naïm, fin et réservé, ne pipa mot. Shlomo Bino, plus baroque, me répondit : « That’s what Begin says » ("C’est ce que dit Begin"). Cedar, du Deuxième Bureau (service de renseignement) des Forces Libanaises était légèrement embarrassé par ma franchise. Car d’un côté, il partageait mon avis. Mais d’une autre côté, il ne savait trop dans quelle direction les Forces Libanaises allaient évoluer sur ces questions. Hélas, les interrogations de Cedar étaient pleinement justifiées : en effet, les Forces Libanaises prirent non pas une, mais plusieurs directions.

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Samir Geagea, à la rigueur, aurait peut-être accepté une alliance avec Israël. Mais Elie Hobeïka, en revanche, était pro-israélien par pur opportunisme. Par la suite il devint pro-syrien, encore par pur opportunisme. Puis pro-business, toujours par opportunisme. Avant de sauter dans les airs au passage d’une voiture piégée made in Syria. Après notre bref séjour en Israël, Cedar et moi fîmes le chemin en sens inverse, jusqu’à Beyrouth. Asher Naïm nous avait remis des photos et des documents accablants sur l’arsenal de Arafat planqué dans les sous-sol du « camps de réfugiés » de Sabra et Chatila.

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A l’époque, Cedar et moi étions jeunes. Nous ne réalisions pas qu’avec ces documents, nous étions des hommes morts, en cas de contrôle, sur notre route, par les milices palestiniennes, par les milices druzes libanaises ou par la milice chiite libanaise Amal. On peut croire ou ne pas croire en Dieu. Mais dans les deux cas, on ne peut pas dire qu’il n’y a jamais de miracles… (à suivre)

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