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lundi 18 août 2008

Avons-nous sacrifié la Géorgie ?

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Avons-nous sacrifié la Géorgie ?
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Il est question, je cite, de la folle initiative de l'impulsif président géorgien. L’initiative, c’était dans la nuit de jeudi 7 à vendredi 8 août. Bien. Je ne me prononce pas sur cette affirmation. Elle relève désormais du passé. En revanche, je reviens sur les faits qui se produisent ces jours-ci. Et sur certaines analyses qu’y sont effectuées suite à ces mêmes faits. Aujourd’hui lundi 18 août 2008 à 08:38 on apprend que la Russie installe des lance-missiles au nord de Tskhinvali - la capitale d'Ossétie du Sud. Le New York Times rapporte que ces missiles menacent Tbilissi - la capitale géorgienne. A 12:12 on apprend que le président de la province géorgienne indépendantiste d'Ossétie du sud - Edouard Kokoïty - refuse que des observateurs internationaux soient postés dans la région. « Nous n’avons pas confiance dans ces observateurs internationaux. Ils sont corrompus » déclare-t-il. Ces informations sont diffusées par Guysen.International.News.
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Encore aujourd’hui lundi 18 août à 12:31 on apprend que les troupes russes avancent encore en Géorgie depuis la ville de Khachouri (centre) en dépit de la promesse de Moscou de retirer ses forces. « Six véhicules blindés russes se dirigent de Khachouri vers Satchkere et six autres vers Borjomi », déclare le porte-parole géorgien Chota Outiachvili. Satchkhere est à environ cinquante kilomètres au nord de Khachouri, tandis que Borjomi est à 25 kilomètres au sud-ouest de cette ville. Ces informations sont diffusées par l’AFP depuis Tbilissi, capitale de la Géorgie.
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Toujours aujourd’hui lundi à 12:34 on apprend que la production pétrolière de British Petroleum en mer Caspienne ne passe plus que par l’oléoduc Bakou (Azerbaïdjan) – Novorossisk (Russie) qui débouche sur la mer Noire en territoire russe et ce après la coupure d'une ligne de chemin de fer traversant la Géorgie et alors que deux autres oléoducs géorgiens restent toujours fermés. « Plus aucune production n'emprunte cette ligne de chemin de fer pour le moment » déclare une porte-parole au siège de British Petroleum à Londres. La Géorgie accuse l'armée russe d'avoir fait exploser un pont ferroviaire stratégique à une cinquantaine de kilomètres de Tbilissi sur la ligne de chemins de fer reliant l'est à l'ouest géorgien. Le pipeline Bakou (Azerbaïdjan) – Novorossisk (Russie) reste de ce fait la seule infrastructure utilisable. Les autres voies d'exportation sont toujours interrompues. L'oléoduc Bakou-Soupsa qui traverse la Géorgie reste toujours fermé. De son côté la Turquie espère rouvrir l'oléoduc Bakou (Azerbaïdjan) – Tbilissi (Géorgie) – Ceyhan (Turquie) une fois achevée la réparation des conduites endommagées au début de ce mois d’août par un incendie en territoire turc revendiqué par les rebelles séparatistes du Parti des Travailleurs du Kurdistan. Ces information sont diffusée par l’AFP depuis Londres.
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Durant le week-end écoulé les faits furent tout aussi alarmants. Hier dimanche 17 août 2008 à 15:07 on apprend que lors d'une conversation téléphonique avec Nicolas Sarkozy le président russe Dimitri Medvedev s'est engagé à ce que les forces armées de son pays se retirent aujourd’hui lundi 18 août dans l'après-midi. Plus tôt dans la matinée le président français avait averti son homologue russe que le maintien des forces armées en Géorgie aurait de « graves conséquences » sur les relations entre la Russie et l'UE. A 16:39 on apprend que la Géorgie sera membre de l'Otan selon la chancelière allemande Angela Merkel en visite à Tbilissi, la capitale géorgienne. Et à 17:27 on apprend que la Géorgie ne reconnaît aucune force de « paix » russe en Ossétie du Sud. Il n'existe que des forces agressives russes déclare le président géorgien Mikheïl Saakachvili dans la conférence de presse donnée à Tbilissi en compagnie de la chancelière allemande Angela Merkel. Ces informations sont diffusées par Guysen.International.News.
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Avant-hier samedi 16 août 2008 à 21:00 les faits sont un brin délirants. « Pourquoi a-t-on fini par signer ? » lance amèrement un proche conseiller du président géorgien Saakachvili. « Pour ne pas voir le lendemain la Une du New York Times barrée par ce titre : ‘La Géorgie refuse le cessez-le-feu’. Voilà pourquoi. Sarkozy est venu ici avec un texte légitimant l'occupation russe et a sommé Misha (ndlr : le président géorgien Saakachvili) de le signer. Il fallait le voir, votre président, incapable de tenir en place dix secondes, agité comme un lapin cocaïnomane. Dites-moi, on ne sait pas lire une carte à Paris ? Dans ce document, pas un tracé précis, pas le moindre zonage, pas l'ébauche d'un calendrier de retrait ». Ces faits sont rapportés par Vincent Hugeux, envoyé spécial de l’Express.
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Une heure et quarante minutes auparavant ce même samedi - soit à 19:20 - on apprend que le président russe Dmitri Medvedev appose sa signature au plan de paix présenté par la présidence française de l'Union européenne et auquel se sont ralliés la Géorgie et les dirigeants des deux régions géorgiennes sécessionnistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie. Medvedev souligne cependant que le retrait militaire russe de Géorgie est suspendu à la mise en place de « mesures de sécurité additionnelles ». La Géorgie accuse l'armée russe d'avoir coupé samedi 16 août sa principale ligne de chemin de fer est-ouest en faisant sauter un pont ferroviaire en plein jour. Des images de télévision de Reuters font apparaître un amas de décombres. Georgui Baramidze - ministre géorgien de l'Intégration européenne - parle à ce sujet d'une catastrophe économique. Des villageois accusent l'armée russe. Des milices russes irrégulières basées en Ossétie du Sud frappent des objectifs géorgiens. Dans la ville géorgienne occupée de Gori - à 45 km de l'Ossétie du Sud - le général russe Viatcheslav Borissov -commandant militaire de la région de Gori - dit : « Lorsque mon président m'appellera sur son mobile et m'ordonnera d'entamer le retrait, j'exécuterai son ordre ». Le secrétaire britannique au Foreign office David Miliband dénonce l'agression de la Russie contre la Géorgie et ses menaces contre plusieurs Etats voisins. Le Kremlin déploie navires de guerre, chars et soldats pour son opération militaire la plus importante hors de ses frontières depuis la chute de l'Union soviétique. Ces informations sont diffusées par Reuters. Encore samedi 16 août 2008, quelques heures auparavant - à 11:49 - Reuters signale que les Russes occupent toujours à Gori. Aucun mouvement de troupes significatif n'est visible dans le secteur de Gori. Nous resterons ici jusqu'à ce que le président géorgien Mikhaïl Saakachvili démissionne, affirme un soldat russe à un barrage à l'entrée de la ville. Voilà pour les faits qui se produisent ces jours-ci.
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Venons-en à certaines analyses qu’y sont effectuées suite à ces mêmes faits. Je ne reviens ni sur les analyses qui imputent la faute au président géorgien. Ni sur les analyses qui sacrifient la Géorgie sur l’autel de nos besoins stratégiques en gaz et en pétrole. Je reviens en revanche sur certaines analyses soulignant le danger que représente une Russie dirigée par des dictateurs maffieux et incultes issus de l’ancien KGB. Car pour moi la réalité c’est cela. En ce qui me concerne - excusez-moi de le préciser - je l’écris depuis le lundi 11 août 2008. Le lendemain mardi 12 août, deux spécialistes de la Russie, Isabella Ginor et Gideon Remez signalent que dans la foulée la Russie - c’est un peu plus crédible que l’amour sans bornes pour les frères ossètes - reprend le contrôle de la route du pétrole de la mer caspienne vers l’Ouest. La prochaine étape pour les Russes pourrait être l’Ukraine. L’Ukraine dont la partie orientale - minière et industrielle - est largement peuplée de russophones. Enfin, une partie de la flotte russe pourrait quitter Sébastopol, en Crimée, pour Tartus, en Syrie.
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Mercredi 13 août 2008 Martin Birnbaum sur LibertyVox monte au créneau : « Deuxième producteur mondial de gaz et pétrole, la Russie dispose d’un droit de veto à l’ONU et plus d’armes nucléaires qu’il ne faut pour anéantir la planète 100 fois. Elle fait ce qu’elle veut et ne se donne même plus la peine de masquer ses intentions. Elle montre l’exemple à l’Iran après avoir laissé la Corée du Nord se doter du nucléaire militaire ».
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Le même mercredi 13 août Laurent Murawiec, à Washington, pour Metula News écrit : « Depuis des années, et singulièrement depuis l’avènement du tchékiste Poutine au Kremlin, Moscou mène un travail de sape systématique contre les républiques libérées des chaînes soviétiques en 1990-91. (…) Les Russes ont monté de toutes pièces des ‘séparatistes’ ossètes, et abkhazes, pour casser la Géorgie, coupable de lèse-Russie. Moscou préparait depuis des mois l’assaut qui vient de se produire. La 58e armée, qui s’est ruée sur la Géorgie, avait été préparée de longue main. (…) il faudra stopper les ambitions russes. Le ferons-nous aujourd’hui, ou attendrons-nous que l’ours se soit renforcé, qu’il ait acquis la neutralité et la passivité de pays européens, mi-alléchés par un pot de miel pétrolier, mi-effrayés par la résurgence de la bête ? (…) baudruche gonflée au gaz naturel, la Russie aux pieds d’argile croit sa grandeur revenue. Faute d’être stoppée net, elle ne s’arrêtera pas ». Et puis il y a l’article « Géorgie - Russie : Sous les obus, le pétrole », écrit par Hélène David pour Guysen International News le mercredi 13 août également.
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Ivan Rioufol du Figaro intervient le lendemain jeudi 14 août 2008 : « Moscou a donc fixé ses conditions à l’Occident. Elle a été jusqu’à faire disparaître, dans les documents négociés, le principe de l’intégrité territoriale géorgienne. (…) le prix que paiera l’Europe de sa lâcheté sera élevé. (…) c’est bien cette couardise, prévisible, qui fait honte et force au pessimisme. Il est aisé d’imaginer, par exemple, la satisfaction de l’Iran, soutenue par la Russie, devant cette débâcle des démocraties, incapables de solidarité entre elles. L’Occident se réveillera-t-il enfin? ».
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Le même jeudi 14 août Jean Tsadik pour Metula News écrit : « la 58e armée ne s’est pas repliée. Au contraire, accompagnés de miliciens venus des provinces sécessionnistes, les soudards de Poutine ont dévasté et pillé d’autres villes et villages ».
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Toujours jeudi 14 André Glucksmann et un autre individu dont le nom m’échappe à l’instant écrivent conjointement dans Libération : « N’allez pas croire à une affaire simplement locale : il s’agit probablement du tournant le plus décisif de l’histoire européenne depuis la chute du mur de Berlin. (…) Qui a tiré, cette semaine, le premier ? La question est obsolète. Les Géorgiens se sont retirés d’Ossétie du Sud, territoire que la loi internationale place, rappelons-le tout de même, sous leur juridiction. Ils se sont retirés des villes avoisinantes. Convient-il qu’ils se retirent aussi de leur capitale ? (…) Qu’attendent l’Union européenne et les Etats-Unis pour bloquer l’invasion de la Géorgie, leur amie ? (…) l’Europe telle qu’elle s’est construite contre le rideau de fer, contre les fascismes d’antan et d’aujourd’hui, contre ses propres guerres coloniales, l’Europe qui a fêté la chute du Mur et salué les révolutions de velours, se retrouve au bord du coma. 1945-2008… Verra-t-on la fin de notre brève histoire commune se sceller dans les olympiades de l’horreur au Caucase ? ».
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L'imposture de la 'protection' par le Kremlin, écrivent David B. Rivkin JR. et Lee A. Casey dans le Wall Street Journal du 15 août : « L'invasion de la Géorgie sera un moment décisif pour la crédibilité de l'Amérique et pour la stabilité du monde. Si le régime Medvedev - ou plutôt Putin - réussit, en employant la force, à renverser un gouvernement démocratique et pro-occidental, au prétexte transparent de ‘protéger’ la population de Géorgie contre son propre état, la scène aura été dressée pour des agressions semblables contre les autres États - de la Baltique à l'Ukraine, qui sont voisins de la Russie mais qui regardent du côte de l'Occident et de la liberté. Aux dangers de l'après-11 septembre s'ajouteront les défis d'une nouvelle guerre froide ».
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« Comment arrêter Poutine » écrit le 15 août Charles Krauthammer dans la Jewish World Review (Adaptation française de Sentinelle 5768 ©) : « Le cessez-le-feu négocié par le président de la France vaut moins qu’il n’y paraît. (…) Bush envoie la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice en France et en Géorgie. Ce n’est pas trop tôt. Sa tâche doit être de présenter ces sanctions, d’obtenir l’accord de l’Europe sur autant de points que possible, et de commencer à les imposer, en les calibrant selon le comportement russe. Et le plus important de tous, empêcher l’Europe de chanceler sur la survie du gouvernement démocratiquement élu de Géorgie ».
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Le grand spécialiste de la Russie Alain Besançon, Membre de l’Institut, écrit vendredi 15 août sur pasta.cantbedone.org : « La tactique est de choisir le moment opportun, le mois d’août, par exemple, quand elle sent les États-unis affaiblis, embarrassés ailleurs, les Européens particulièrement divisés. C’est alors la frappe surprise. (…) Aujourd’hui l’invasion de la Géorgie. Cette répétition est lassante, mais moins encore que la répétition de nos réactions à nous, les Occidentaux. Le mensonge russe est si gros qu’il est toujours à moitié cru. Nos diplomates, à qui la diplomatie russe ment en pleine figure, en subissent la sidération. Ils n’osent pas dire : « Vous mentez. Vous êtes au fond un tigre de papier. Votre économie est misérable, votre démographie en ruine. Retirez vous tout de suite et rentrez chez vous ». A la place, nous élevons des protestations feutrées, nous appelons au dialogue, à la négociation. La Russie garde sa proie. Et puis c’est oublié jusqu’à la prochaine fois. ‘Nous n’allons pas revenir à la guerre froide’, dit on… (…) Notre jobardise, notre crédulité, notre naïveté sont, avec la domination, l’autre grande satisfaction de l’État russe ».
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Il y a d’autres analyses réalistes : « La guerre en Géorgie révèle les contradictions existentielles de l’Union L’Europe mourra-t-elle à Tbilissi ? » écrivent - le samedi 16 - Elisabeth Lévy et Gil Mihaely sur causeur.fr : « l’Europe n’aura pas de position et donc, pas de politique. De même qu’elle n’en a pas eu lors de la déclaration d’indépendance du Kosovo, Etat que plusieurs membres de l’Union Européenne n’ont pas reconnu. Ce qui n’empêche pas les dirigeants de ce pays mal né, encouragés par les hordes de conseillers internationaux qui financent ainsi l’achat de leurs maisons de campagne, de promettre, en guise d’avenir radieux, l’adhésion à l’UE. Bien malin qui pourrait dire à quoi elle ressemblera, cette Europe Unie, dans cinq ou dix ans. Quoi qu’il en soit, hier dans les Balkans, aujourd’hui dans le Caucase, l’Europe politique est morte. A supposer que, depuis la Sainte Alliance, elle ait jamais existé ».
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Hier dimanche 17 août 2008 Laurent Murawiec, à Washington, pour Metula News écrit : « Poutine a préparé l’action de longue main, dès le mois d’avril, nous dit le spécialiste russe des affaires militaires Pavel Felgengauer. On ne lance pas à l’improviste une opération combinée des commandos, des unités de blindés, de la marine et de l’armée de l’air… (…) Washington a en fait donné à comprendre à Poutine que les Etats-Unis ne feraient rien. On peut aujourd’hui faire monter les décibels, ça ne change pas les réalités sur le terrain ni le fait accompli. L’unique signe positif enregistré aux Etats-Unis a été l’attitude vive et ferme du candidat républicain McCain ».
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A l’heure où je mets cet article sous presse lundi 18 août 2008 en fin d’après-midi, j’apprends que dans un discours prononcé à Koursk le président Dimitri Medvedev a prévenu que toute « agression » contre des « civils russes » provoquera une « riposte écrasante ». Et j’apprends qu’aujourd’hui - contrairement à ce qu'affirme la Russie - aucun signe de retrait des forces russes des zones de combat n’est perceptible… A demain.
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Miguel Garroté
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